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Yachting Classique - Griffon 2006
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18 novembre 2014

Partir au lof

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Chacun de nous voit malheureusement assez bien de quoi il retourne : partir au lof consiste, en général à l’insu de son plein gré, à subir brutalement un changement de route immaîtrisable, qui peut se finir le plus souvent par quelques dégâts collatéraux à bord, notamment la chute du plat de pâtes cuisiné la veille avec amour par l’équipière de votre vie.

Et je ne vous parle pas de l’état du spi, transformé en chalut.

Bref, un désastre.

L’origine de l’expression est restée longuement inconnue jusqu’à ce que le Centre Scandinave de Recherche Historique nous en donne enfin une explication.

C’était vers l’an 970, sur la petite ile de Tür, dans le Limfford de l’actuel Danemark.

A cette époque mouvementée, le Viking trouve chez lui un repos bien mérité entre deux expéditions lointaines, sur les côtes anglaises ou françaises, selon  l’humeur du moment et les vents dominants.

L’abondance en vierges locales joue aussi un grand rôle dans le programme de navigation

 

Olaf est un de ces robustes indigènes, le verbe haut et le casque emplumé. Sa réputation est redoutable, presque autant que celle de Harald à la dent bleue, son copain de virée.

C’est vous dire.

Oui mais voilà.

Olaf a rapporté de la bataille de Cornouailles une très vilaine blessure à la cheville, qui le fait terriblement souffrir dès que le temps est humide, c'est-à-dire à peu près chaque jour dans ce pays hydrométriquement défavorisé.

Et qui lui donne une démarche chaloupée, à l’orientation souvent incertaine.

Olaf est alors vite de mauvaise humeur. Surtout quand Hildegarde, sa Hüsfreya à la carrure d’athlète, femme de tempérament, le houspille en jurant. Elle ne supporte pas qu’on mette le nez dans ses marmites de Thorrablot, le ragout roboratif local.

Reste la taverne du coin, refuge des anciens combattants dans tous les pays et à toutes les époques de l’histoire.

Olaf ne boit pas modérément.

Il engloutit.

Il tente de se faire croire qu’il embarquera à nouveau pour découper du chrétien,   piller l’or des églises,  et ramener quelques filles girondes.

Tout ça est bien tentant, il est vrai.

Quelques chansons plus tard, Olaf est cette fois totalement ivre, comme presque chaque soir.

Mais il faut rentrer, vu que Hildegarde ne plaisante pas avec les horaires et que le Thorrablot doit se manger chaud, gloire militaire ou non

Le départ d’Olaf est un spectacle que les enfants ne manquent jamais.

Au début, il va assez droit.

Mais de temps à autre, remontée d’hydromel ou douleur aigue de la cheville, va savoir, la trajectoire d’Olaf prend un angle bizarre du meilleur effet.  

Le trajet en est allongé d’autant.

Le Thorrablot est froid.

Hildegarde menace de rentrer chez sa mère .Oui, déjà à cette époque.

Les enfants de tous temps étant cruels comme on sait, ils appellent ça « partir comme Olaf ». Et de pouffer de rire.

L’expression devient vite populaire dans tout le Danemark

On y fait appel  chaque fois que quelqu’un  a trop bu ou quand un cheval fait un écart ;

Il est attesté dans les annales des Saint Bertin qu’un charretier du nom de Glübleif avait copieusement insulté son cheval en  lui reprochant  de « partir comme Olaf. »

Vers 1480, juste avant que les espagnols succèdent au vikings dans l’exploration de l’Amérique, un capitaine Espagnol qui doit tenter avec la Santa Christina, une robuste , de longer la cote africaine, embarque comme scribe un vieux moine cistercien qui a passé une partie de sa vie à finir de christianiser les vikings, et qui parle encore couramment le norrois, ce sabir joliment guttural.

Au large de l’actuelle Mauritanie, par un vent de terre chaud et capricieux, une risée brutale   fait pencher la Santa Christina et l’entraine bout au vent

Le vieux moine s’écrie derechef « Ola , on part comme Olaf. »

Le capitaine Francisco Sotomayor y Oloa entend la chose, la répète, la consigne dans son livre de bord.

Puis, plus rien pendant plusieurs siècles. Olaf à disparu.

Dommage.

Pour une raison inconnue, l’expression déformée revient dès le début du XVIIème.

Partir au Lof est citée pour la première fois en 1784 par Bourdé-Villhuet, capitaine des vaisseaux de la compagnie des Indes.

Et depuis, sans discontinuer, on part au lof sans la moindre pensée pour ce brave Olaf, qui lutine les petites au Walhalla des Vinkings et boit des coups avec Olin et Thor, ses Dieux préférés.

Voilà.

Vous savez tout.

Reste à mieux attacher le plat de pâtes sur le réchaud à cardans pour éviter les dégâts du départ au lof.

Quand au Thorrablot, veillez à bien le manger chaud.

Mais ceci est une autre affaire…

 

 

Captain Bioman of Griffon.

Philologue

Commodore du Royal Wet & Sea

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